Il a posé son front sur la vitre glacée de la fenêtre. C'est une belle journée même s'il fait froid, et puis ce vent glacial qui s'insinue dans les interstices de la fenêtre. Il reste là, la tête appuyée contre ce carreau. Il regarde dehors. Il ne voit rien. D'ailleurs il n'y a rien à voir. A part le jour qui décline derrière les arbres, un peu plus loin, et le ciel qui se teinte d'orangé. Derrière lui, Tindersticks déroule son tapis langoureux. Il ne sait pas pourquoi il s'est mis à regarder par la fenêtre. Il sait qu'il n'y verra rien. "If you're looking for a way out". Ca doit être ça. Il doit penser à un ailleurs, il ne sait même pas lequel, il n'arrive pas à se l'imaginer. Il ne se sent pas mal, pas triste. Juste étrange. C'est un dimanche après-midi où il ne se passe rien et ça lui convient. Peut être parce qu'il était si bien hier soir, léger. Peut être est-ce cela qu'il trouve étrange. Il écoute la voix de Stuart Staples, le front toujours collé à cette vitre glacée. "Pretty words, Likes ones you've never heard". Il trouve que ses mots s'étiolent. Qu'ils ne sont pas à la hauteur de ce qu'il voudrait exprimer. Surtout quand il parle à des filles qui lui plaisent. Il y a quelque chose qui se bloque en lui. Il voudrait être lyrique parfois. Il craint d'être ridicule. Alors ses mots n'ont pas la force qu'il souhaiterait leur donner. Peut être que la fille en face s'en rend compte. Que le trouble dans ses gestes, son regard en disent finalement plus. Il a un frisson. Le froid sûrement. Les mots à la fin de la chanson aussi. "Waiting for those hands to come". Oui, il n'y a pas que le froid. Des mains il en attend. Il ne sait pas lesquelles. Mais des mains. Qui se poseraient sur lui. Des mains qui passeraient dans ses cheveux, sur sa nuque. Qui glisseraient sur ses épaules, sur sa poitrine. Des mains chaudes, douces. Des mains qu'il caresserait, qu'il embrasserait doucement. La musique derrière se fait plus lointaine. Il sent dans son dos la chaleur de l'orgue Hammond insitant qui irradie cet album, le doux frottement des cordes, le reste s'est éloigné. Il essaye de retrouver dans sa mémoire, le souvenir de mains sur sa nuque, de doigts qui attiraient son visage vers le sien, vers ses lèvres. Il ne sait même plus lesquelles. Peut être toutes à la fois. Celles qu'il a connues, celles qu'il a imaginées. Il reste là, à regarder la nuit envahir le ciel. Les pensées perdues dans l'évocation de ces mains qui lui manquent tant. La musique lui revient à l'esprit avec la litanie finale de l'album. "I won't make you cry, Tell you lies, Never say goodbye". Des promesses intenables. Il se dit que ses illusions se sont transformées en craintes. Une lucidité qui lui fait peur. Mais qui ne l'empêche pas de rêver. C'est peut être ça son problème. Ou son romantisme. Ca le fait sourire. Un sourire un peu acide mais un sourire tout de même. Il sent le froid qui gagne ses épaules, se rend compte que le disque est terminé. Il va remettre Pretty words. Il va repenser à des mains. A des mains douces et chaudes. Alors il retire son front de la vitre glacée par l'air froid extérieur. Il est resté trop longtemps ainsi. Son corps frissonne. C'est un dimanche après-midi où il ne se passe rien. Et maintenant il fait nuit.
"Pretty words Likes ones you've never heard Oh those pretty words What can they say?" Tindersticks : Pretty words (Album Simple Pleasure)
Dresden Dolls : Dresden Dolls
Andrew Bird : The Mysterious Production Of Eggs
The Arcade Fire : Funeral
Rufus Wainwright : Want two
Nirvana : When the lights out
Eels : Blinking lights and other revelations
Beck : Guero
I am Kloot : Gods and monsters
The Smiths : The world won't listen
Hood : Outside closer
V.a : Golden apples of the sun
Jude : Sarah
Antony and the Johnsons : I'm a bird now
Black heart procession : 2
Lou Reed - John Cale : Songs for Drella
Pinback : Summer in abadon
Blonde Redhead : Melody of certain damaged lemons
Joy Division : Closer
Otis Redding : The definitive Otis